Depuis 16 ans, Jean-Jacques occupait un emploi dans la sécurité qu’il a conservé au-delà de la retraite pour améliorer ses revenus. Ces dernières années, il était affecté au centre commercial de Val d’Europe à Serris (Seine-et-Marne). Un soir de janvier 2024, alors qu’il venait de terminer son service et se hâtait pour rallier la gare, la situation a dérapé. Peu après, il s’est retrouvé confronté à la justice.
« Dénoncer une agression sexuelle »
Ce soir-là, une jeune femme de 21 ans entrait au commissariat de Lagny-sur-Marne pour déposer plainte. Vendeuse dans une boutique de lingerie féminine à Serris, elle venait dénoncer une agression sexuelle. Elle a alors détaillé les circonstances mettant en cause un vigile chargé d’assurer la sécurité des personnes du centre.
Elle venait de participer au rangement du magasin avant sa fermeture. Au moment de sortir, un homme est passé dans son dos et lui aurait touché les fesses. Elle s’est immédiatement retournée et l’a reconnu physiquement pour l’avoir déjà croisé en tenue professionnelle. Mais elle est restée tétanisée, incapable de réagir ni de l’interpeller, alors qu’il quittait les lieux sans un mot.
Elle a mentionné l’absence de témoins mais a signalé la présence de caméras de surveillance dans l’allée desservant les commerces.
La vidéosurveillance en guise de témoin
À la barre, Jean-Jacques a accepté spontanément de répondre aux questions. La juge s’est montrée directe en lui demandant « Pourquoi ? ». Il a alors répondu : « J’ai fini mon service et je me suis changé. Je suis parti rapidement pour attraper mon RER. Je marchais vite et j’ai peut-être frôlé cette femme. Je ne me suis pas rendu compte. Dans le train, mon responsable m’a contacté pour me demander des explications. C’est là que j’ai découvert ce qu’on me reproche mais dans ma tête, je n’ai rien fait de mal ! ».
La juge a invité le prévenu et les avocats à venir visualiser sur son ordinateur les images extraites de la vidéosurveillance. Hormis Jean-Jacques qui a continué à affirmer qu’il n’avait aucune intention malveillante et qu’il avait peut-être touché Océane par mégarde, tous ont convenu que le geste avait bien été fait avec la paume de la main.
Geste maladroit ou intentionnel ?
C’est la question que le tribunal a dû se poser pour décider du sort d’un homme jusque-là sans histoire. Un homme qui a choisi de démissionner, « ne supportant pas d’être suspect ».
Dès sa prise de parole, l’avocat d’Océane s’est engouffré dans la détermination des magistrats du Parquet et du Siège à lutter contre les agressions sexuelles et les violences faites aux femmes. « Peut-être monsieur a-t-il pensé que les employées de ce commerce considéré comme un temple du glamour étaient plus accessibles », a-t-il poursuivi. Puis pour étayer sa demande de dommages et intérêts de 5 000 €, il a dépeint un tableau très sombre de sa cliente : une jeune fille traumatisée, en proie aux insomnies, n’osant plus sortir seule, ne supportant plus de voir un homme s’approcher d’elle, ayant perdu son emploi.
Dans ses réquisitions, la procureure de la République a retenu l’absence de consentement comme élément à charge. Tenant compte de la personnalité du prévenu, de son parcours judiciaire sans faute, elle a requis une amende de 600€ dont 400€ avec sursis.
L’avocate de Jean-Jacques a choisi de plaider le geste involontaire résultant d’une maladresse. Elle a cité une de ses premières paroles lors de leur entretien préparatoire : « Je ne toucherais jamais une jeune fille qui a l’âge de ma petite-fille ». Aidée par le passé judiciaire de son client vierge de la moindre infraction, elle a sollicité la relaxe.
Les juges ont requalifié les faits en violence sans incapacité de travail et ont infligé à Jean-Jacques une amende de 150€. Il devra verser à Océane 300€ pour le préjudice subi et 800€ pour les frais d’avocat.
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