C’est officiel : Romain Ntamack manquera Italie-France. Le Comité des 6 Nations a confirmé que l’ouvreur du XV de France, suspendu 3 semaines après son expulsion contre le pays de Galles (ramenées à 2 semaines, avec validation du Coaching Intervention Program), raterait les rencontres contre l’Angleterre (automatique) et l’Italie. Sauf que l’instance n’a pas pris en compte la journée de Top 14 entre les deux matchs du Tournoi, dissociant ainsi les deux compétitions. Contacté par Actu Rugby, un avocat du sport se dit surpris, et met notamment en avant un point de règlement de World Rugby. Par ailleurs, le précédent Paul Willemse contredit la sanction appliquée pour Ntamack. Comme un sentiment de se sentir lésé ! Explications.
Nombre de semaines ou nombre de matchs ?
Le cas Romain Ntamack fait beaucoup parler. Et notamment les matchs pris en compte par sa suspension. Si on se réfère à la décision du 6 Nations, c’est 3 matchs (ramenés à 2 après le CIP). C’est très clair, dès même le premier communiqué publié le 5 février par l’instance en charge du Tournoi. Et le terme « match » est important.
Sauf que. Contacté par Actu Rugby, Antoine Semeria, avocat du sport, met en avant le règlement édité par World Rugby, l’instance suprême, celle qui est censée régir toutes les compétitions de rugby de la planète.
« C’est accessible sur le site de World Rugby. Je prends l’article 17.3.1 b. Que dit-il ? « Une suspension sera en général imposée pour un certain nombre de semaines pendant lesquelles il aurait été prévu que le joueur concerné dispute un match remplissant les critères stipulés au règlement 17.21.3. Tous les matches sont égaux, quel que soit le niveau de compétition indiqué » ».
De ce fait, World Rugby ne dissocie pas les compétitions. Et le 6 Nations se baserait sur son propre règlement/sa propre interprétation du règlement, au contraire des championnats domestiques, de la majorité des matchs internationaux et de la Coupe du monde.
Dissociation
Le cœur du problème réside avant tout sur le fait de dissocier les compétitions de la part du 6 Nations.
Soulignons toutefois que le cas de figure de Romain Ntamack n’est pas une première pour un Français. En effet, durant le Tournoi des 6 Nations 2023, le pilier Uini Atonio, cité après un carton jaune contre l’Irlande (11 février), avait écopé de 3 matchs de suspension (ramené à 2).
Le Rochelais avait été privé des rencontres contre l’Écosse (26 février) et l’Angleterre (11 mars), et n’avait pas pu jouer les deux affiches de Top 14 entremêlées (18 février et 4 mars). Soit au final un arrêt de plus d’un mois pour Atonio.
Le cas Paul Willemse
En fouillant dans les archives, nous avons retrouvé un cas particulier. Celui de Paul Willemse lors du 6 Nations… 2024 (exclu lors du match d’ouverture contre l’Irlande). Soit l’an passé. Pas bien vieux donc.
Sans se focaliser sur les termes matchs (présent sur le rapport officiel de la commission de discipline signé par le joueur) et semaines (disponible sur Internet), on s’aperçoit que Paul Willemse a vu les rencontres du championnat domestique (soit le Top 14) entrer dans le décompte de sa suspension. L’inverse donc des cas Atonio et Ntamack.
Romain Ntamack, joueur Premium ?
La commission de discipline qui a instruit le dossier Romain Ntamack a probablement estimé que l’ouvreur de Toulouse est un joueur Premium de la France. Et donc qu’il n’aurait pas été remis à la disposition de son club pour jouer en Top 14, une semaine avant Italie-France.
« Considérer des joueurs comme Premium, c’est une spécificité française, qui ne concerne pas les autres nations. Cela ne regarde par la commission de discipline. Là, on est très clairement sur de l’interprétation », souligne l’avocat Antoine Semeria.
« Quand bien même le joueur est qualifié de Premium, ce n’est absolument pas un motif. Regardez Georges-Henri Colombe : il est Premium, a joué contre l’Angleterre, peut être aligné en Top 14 ce week-end car relâché, et peut être rappelé pour Italie-France. Il n’y a pas de distinction ».
Deux choses : Romain Ntamack ne figure pas dans « la liste officieuse » des 42 joueurs dit Premium car… le Toulousain n’a joué aucun match avec les Bleus en 2024. Par ailleurs, Fabien Galthié n’a pas inscrit RNT dans la liste des 19 protégés pour Italie-France, comptant sur le match de Top 14 Clermont-Toulouse afin de lui faire purger une semaine de suspension. Et donc pour pouvoir aligner son n°10 à Rome.
« C’était très malin de la part du staff des Bleus et de la FFR », souligne Me Semeria. Sauf que la Commission de discipline ne l’a pas entendu ici. « Comme le dit le règlement, tous les matchs sont égaux. Cela marcherait dans un seul sens, et pas dans l’autre. C’est pour le moins curieux », s’interroge l’avocat.
Enfin, preuve que Romain Ntamack était bien à disposition de son club, l’ouvreur s’est entraîné dès lundi matin au Stade Toulousain, effectuant notamment des skills. « En constatant cela, on voit bien qu’il n’y a pas dissimulation », souligne Me Semeria.
Toulouse toujours dans le flou
Si Romain Ntamack manquera donc deux matchs du Tournoi des 6 Nations 2025, quid de Clermont-Toulouse ce week-end ? Si on lit le document du Comité des 6 Nations, l’affiche de Top 14 n’est pas évoquée, mais il est spécifié que le joueur de Toulouse « sera requalifié à compter du 24 février ».
Et dans les règlements de World Rugby, il est écrit au point 17.3.1 b « un joueur suspendu ne pourra participer à aucun match à quelconque niveau de jeu pendant la période de la suspension du joueur ». Qui et quoi prendre en compte ?
Joint par Actu Rugby, le Stade Toulousain ne savait toujours pas en ce mardi après-midi s’il pouvait compter sur Romain Ntamack pour son match de Top 14 à Clermont ce week-end. Une situation ubuesque jusqu’au bout…
Contactée par RMC Sport, la FFR a annoncé qu’elle ne ferait pas appel de la suspension de Romain Ntamack.
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