« Anomalie démocratique » pour les uns, « réforme alambiquée destinée à réduire le pouvoirs des maires d’arrondissement » pour d’autres, la proposition de loi visant à réformer le mode d’élection des maires de Paris, Lyon et Marseille (PLM) est à nouveau au centre de l’attention des élus de la capitale, depuis son adoption par la commission des lois, mercredi 2 avril 2025. À l’ordre du jour de l’hémicycle de l’Assemblée nationale lundi 7, ou mardi 8 avril 2025, elle fera également l’objet d’un débat – qui s’annonce animé – au prochain Conseil de Paris, prévu du 8 au 11.
Une spécificité qui dure depuis plus de 40 ans
Depuis 1982, la loi PLM attribue à ces trois villes un régime spécifique. À Paris, les électeurs votent pour des listes municipales par arrondissement. Ce sont ensuite les conseillers élus, sur le mode des grands électeurs, qui élisent le maire de la ville dans la semaine qui suit le second tour. « Une incongruité » pour Maud Gatel, la présidente du groupe MoDem et Indépendants au Conseil de Paris.
« Tous les jours, les gens nous disent que ça ne sert à rien de voter, relève-t-elle lors d’un point presse organisé en amont du Conseil de Paris. C’est un système qui favorise le clientélisme, avec certains arrondissements plus importants sur le plan électoral ». Régulièrement invoquée, la formule « un électeur, une voix » tend à mettre en évidence un spécificité de la loi PLM : un maire peut être élu sans obtenir la majorité des voix, comme ce fût le cas de Jean-Claude Gaudin à Marseille, en 2014.
Cette réforme repose sur deux mensonges.
La sénateur communiste, Ian Brossat, enrage. « Il y a l’idée que la gauche l’emporte depuis 2001 par effraction, alors que tous les maires de Paris ont remporté la mairie avec plus de voix que leur opposant. Il est plus difficile de trouver de faux arguments que de bons élus. L’autre chose, c’est qu’ils sous-entendent que les Parisiens pourraient directement élire leur maire, ce qui est complétement faux. Comme toutes les municipales, on élit un conseil municipal… » Fatoumata Koné, présidente des Écologistes, met les pieds dans le plat : « Je ne sais pas pourquoi Madame Dati est persuadée que cela peut lui permettre de gagner. »
« On ne change pas les règles à un an d’une élection »
Initialement déposée par les élus Ensemble pour la République Sylvain Maillard, David Amiel, Olivia Grégoire et Jean Laussucq, la proposition de loi, appelée de leurs vœux par Emmanuel Macron et François Bayrou, était cette fois soutenue par le proche du Premier ministre, Jean-Paul Matteï (Les Démocrates). « Cette réforme est taillée sur-mesure pour la macronie parisienne », évacue Ian Brossat.
Celle-ci prévoit, notamment, la mise en place de deux urnes distinctes : un vote pour les conseillers d’arrondissement et un autre pour les conseillers municipaux qui élisent ensuite le maire. Maire du 17e arrondissement et président du groupe Union Capital, Geoffroy Boulard est perplexe. « Il faut une évolution dans le mode de scrutin, mais cette réforme ne vas pas dans le bon sens. C’est de la centralisation à l’extrême, du bricolage. Il faut redonner du pouvoir aux maires, pas à la mairie centrale », juge-t-il.
Visiblement agacé, le premier adjoint à la mairie de Paris, Patrick Bloche (PS), balaye la réforme d’un revers de manche. « 14 maires sur 17 se sont exprimés contre. Il a fallu que le rapporteur s’y reprenne à trois fois pour qu’elle soit adoptée. Nous sommes opposés à cette proposition de loi qui désorganise un système qui fait ses preuves depuis des années. »
Et de conclure : « Dans le cas – peu probable – où elle passerait à l’Assemblée nationale, nous déposerions un recours. On ne change pas les règles du scrutin à un an d’une élection. »
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