Un crime d’une rare sauvagerie, et une cavale digne d’un roman. Ce lundi 7 avril 2025 doit s’ouvrir devant les assises de Paris le procès de Wael M.. Il est accusé d’avoir assassiné en 2010 son ex-femme et gravement blessé son nouveau conjoint dans le 18ᵉ arrondissement. L’accusé, qui encourt la perpétuité, avait fui au bout du monde pour échapper à la justice. De la Tunisie en pleine révolution à la forêt amazonienne, récit d’une incroyable histoire.
La jeune femme exfiltrée pour fuir les violences
Tout commence en 2009 par un coup de foudre. Eslam, 19 ans, tombe sous le charme de Wael M. lors d’un voyage en Tunisie, où vit sa famille. La jeune française décide de rester aux côtés de cet entrepreneur fortuné. En moins d’un an, le couple se marie, mais la lune de miel tourne au cauchemar. À plusieurs reprises, la mariée est frappée, insultée et même droguée par cet homme d’affaires influent, ayant des accointances avec le régime de Ben Ali, au pouvoir à l’époque des faits.
Les proches d’Eslam ont vent de ces violences. Ils tentent de faire fuir la jeune femme. La première tentative est un échec, car par ses relations, l’accusé parvient à empêcher la famille de prendre l’avion. La seconde tentative fonctionne grâce à l’audace de la mère d’Eslam. Après une course-poursuite en voiture avec Wael M. armé d’une gazeuse, la famille réussit à mettre la jeune femme dans un bateau. Direction la France où Eslam refait sa vie.
Tuée de 16 coups de couteau
La distance n’arrête pourtant pas Wael M.. Il menace de mort son ex-compagne et sa famille à plusieurs reprises. « Je vais te faire la peau », lance-t-il à son ancienne épouse. En juin 2010, il traverse la méditerranée. Il se fait teindre les cheveux en blond afin de ne pas être reconnu, et s’équipe de menottes et d’un couteau de chasse.
Le 18 juin, Wael M. se rend au domicile d’Elsam, situé dans le 18ᵉ arrondissement. La jeune femme rentre d’une soirée avec des amis. Avec son nouveau conjoint, elle prend l’ascenseur. Ils sont surpris par l’ancien mari. La jeune femme reçoit une quinzaine de coups de couteau. Deux lui seront fatals. Son compagnon est touché au bras. Gravement blessé, il parviendra à s’en sortir.
De la Tunisie au Brésil
L’accusé ne perd pas de temps. Il fonce dans un taxi direction gare de Lyon. Il prend le train pour Marseille et s’embarque vers l’Italie avant de rejoindre la Tunisie. Un mandat d’arrêt est émis à son encontre. Pourtant, les autorités tunisiennes tardent à interpeller cet homme influent. La famille de la victime embauche des détectives et des avocats pour tenter de faire avancer la procédure. Fin 2011, les espoirs s’évaporent. Les printemps arabes éclatent. Dans le trouble des révolutions, se faire oublier est plus aisé. L’époux meurtrier disparaît sans laisser de traces.
Tout semble perdu. En 2017, la cour d’assises juge Wael M. en son absence. Il est condamné à 30 ans de réclusion criminelle. Au même moment, la famille de la victime fait une découverte capitale dans la presse brésilienne. Un homme a été emprisonné pour avoir jeté un cocktail Molotov sur une femme. Il s’agirait de Wael M..
Fin de cavale en Argentine
Les proches d’Eslam parviennent à se faire confirmer l’information. C’est le début d’une longue procédure avec les autorités du Brésil afin de permettre l’extradition de l’accusé. Les années passent, puis Jaïr Bolsonaro arrive au pouvoir. Les relations se tendent avec la France, et le transfert du criminel est remis aux calendes grecques. En 2020, nouveau rebondissement : Wael M. s’enfuit de la prison où il purgeait huit ans de détention pour tentative d’homicide.
La cavale prend une tournure exotique. L’accusé traverse l’Amazonie, et se retrouve en Argentine en 2021. Là-bas, il suscite très vite la méfiance. Il monte dans un taxi, mais le conducteur décide de le signaler aux autorités qui l’interpellent. Sur lui, les policiers découvrent des sommes astronomiques d’argent. La suite tient du feuilleton. C’est le chauffeur de taxi qui va contacter la famille de la victime en Tunisie.
Une nouvelle procédure d’extradition est lancée. Wael M. fait tout pour retarder l’échéance, mais foule finalement le sol français en février 2024. Ce lundi, il va devoir répondre des graves accusations portées à son encontre. Le procès est prévu pour durer jusqu’au 11 avril 2025.
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