Devant les urgences dentaires de l’hôpital Morvan à Brest, Jason attend patiemment l’ouverture des portes. Le trentenaire est arrivé à 8 h de Châteaulin,. Deux personnes figurent devant lui, d’autres se pressent à sa suite.
Jason se débat avec ses dents de sagesse, trois le font souffrir. Il a fait le tour des dentistes dans sa commune et aux alentours, en vain. « Ici, c’est le dernier recours », souffle le Finistérien.
Les cabinets dentaires sont saturés. Face à la pénurie de chirurgiens-dentistes, les habitants se ruent vers les urgences brestoises.
« J’ai appelé tous les dentistes de Brest présents sur Doctolib »
Anaïs, étudiante brestoise originaire de Toulon, s’est également résolue à venir au CHU. « C’est la seule solution », affirme la jeune fille, martyrisée par une dent de sagesse. « J’ai appelé tous les dentistes de Brest présents sur Doctolib », assure-t-elle. La jeune femme a réussi à dégoter un rendez-vous, mais en juin. Impossible pour elle de tenir jusque-là.
Gwendoline, arrivée il y a un an de région parisienne, a aussi multiplié les coups de fil, sans succès. Ce mercredi matin, après trois semaines de lutte, elle a foncé aux urgences. « Pas le choix, ça fait trop mal. Je ne dors plus et je ne mange plus. »
Jason sort de la consultation soulagé. Il a obtenu un rendez-vous en urgence pour le mois de mai : « On va m’enlever la dent la plus sévère ». Pour les deux autres, il va cependant devoir trouver un dentiste.
« Nous faison le maximum »
Les urgences dentaires sont ouvertes du lundi au vendredi de 9h à 12h et de 13h30 à 18h, avec une garde assurée le week-end sur le site de la Cavale-Blanche. « Ça ne désemplit pas », constate Sylvie Boisramé, professeure et doyenne de la faculté d’odontologie de l’université de Bretagne occidentale (UBO). En une décennie, la fréquentation a augmenté de plus de 120 %. 13 000 passages sont aujourd’hui enregistrés, en moyenne, par an.
« On a des patients qui affluent de partout du Grand Ouest, y compris de Nantes ».
Les urgences brestoises sont les seules du département et même au-delà. Les villes de Rennes et de Nantes en sont dotées, mais elles ne fonctionnent pas le week-end.
« Nous ne pouvons pas accueillir tout le monde. Nous sommes obligés de prioriser », reconnaît Arthur Schmouchkovitch, chef du service d’odontologie, évoquant les hémorragies ou encore les traumatismes. Le taux de prise en charge s’élève à 50 %. « Nous essayons de faire le maximum avec les moyens que nous avons », martèle Sylvie Boisramé.
Les soins sont réalisés par les étudiants de la faculté, entre 12 et 14 sont mobilisés chaque jour.
Davantage d’étudiants formés à la rentrée 2025
Selon les chiffres publiés en juillet dernier, le Finistère compte un chirurgien-dentiste pour 1 437 habitants. « Un chirurgien-dentiste n’a la capacité de ne soigner que 831 patients par an », rappelle Sylvie Boisramé.
Il n’y a clairement pas assez de praticiens pour satisfaire les besoins de la population. Population, qui dans le même temps, vieillit, ce qui induit davantage de personnes à soigner. Arthur Schmouchkovitch évoque également la technicité des soins :
Ils prennent plus de temps, mais on soigne mieux.
Pour pallier le manque de professionnels, l’UBO va renforcer de 40 % ses effectifs. À la rentrée prochaine, ils seront 50 étudiants contre 36 actuellement. Un investissement de 800 000 euros pour l’UBO, qui a lancé un financement participatif pour récolter des fonds.
Les Brestois espèrent, à l’horizon 2030, voir aboutir la création d’une nouvelle faculté dentaire et un nouveau service d’odontologie, médecine bucco-dentaire et chirurgie orale.
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