Voix calme, discours léché et lunettes posées sur le bout du nez : Saïd Benmouffok cultive une image de gendre idéal. À 41 ans, ce professeur de philosophie en Seine-Saint-Denis vient d’être officiellement investi chef de file pour les municipales à Paris, sous les couleurs de Place Publique, le parti de centre-gauche qu’il a cofondé avec Raphaël Glucksmann en 2018. Fort des 24 % obtenus par leur liste aux élections européennes dans la capitale, il espère surfer sur cette dynamique. Aujourd’hui, le parti revendique près de 1 500 adhérents à Paris. En interne, le quadragénaire est décrit comme une personnalité mesurée, consensuelle, « la force tranquille » selon l’un de ses proches. Reste à savoir si ce profil discret saura émerger dans un paysage parisien fragmenté, dominé par des figures plus établies. Énième candidat à gauche, il tiendra son premier meeting de campagne ce mardi 8 avril 2025 à la Rotonde Stalingrad (19e), avec l’ambition de s’imposer comme une alternative crédible au sein d’une gauche en quête de clarté.
La rédaction d’actu Paris s’est entretenue avec cette figure montante de Place Publique pour cerner ses ambitions, sa stratégie et sa vision d’une capitale en transition.
actu Paris : Vous avez été conseiller d’Anne Hidalgo en charge de la jeunesse, de l’enseignement supérieur et de la recherche, et vous êtes un proche de Lucie Castets. Pourtant, vous restez encore peu connu des Parisiens. Face à des figures bien installées à gauche comme David Belliard, Rémi Féraud ou Ian Brossat, comment comptez-vous peser dans cette campagne ?
Saïd Benmouffok : Place Publique est une force neuve dans le débat parisien, mais nous bénéficions de la dynamique des élections européennes. Cela démontre que la gauche, telle que l’incarne notre parti, c’est-à-dire attachée à l’Europe, aux valeurs de la démocratie, à l’éthique de la vérité, et aux liens entre la justice sociale et l’écologie, répond aux aspirations profondes des Parisiennes et des Parisiens. Certes, ma notoriété, pour l’instant, est encore à construire, mais c’est normal, cela fait partie de la nouveauté, et je fais partie des nouveaux visages à gauche. Ce qui m’intéresse moi, c’est d’acquérir une notoriété par la force des idées que nous allons porter dans le débat.
actu Paris : Justement, la campagne a déjà débuté pour de nombreux candidats à la Mairie de Paris. Les sujets du logement, de l’écologie ou encore de la sécurité dominent les débats. De votre côté, quelles seront vos priorités durant cette période de campagne municipale ?
S.B : Trois grands axes structureront notre campagne. D’abord, la protection des Parisiennes et des Parisiens par le renforcement des solidarités. Ensuite, la transformation de la ville pour faire face à l’urgence écologique. Enfin, le rassemblement autour des valeurs démocratiques. Paris est une ville cosmopolite, une ville dont on est fier, une ville qui témoigne d’un dynamisme majeur. Et en même temps, Paris, c’est une ville qui affronte les enjeux de notre époque, c’est-à-dire le péril démocratique, la crise écologique qui s’amplifie, ainsi que les nouvelles formes de précarité qui frappent de plus en plus nos habitants. Mon idée, c’est de faire de Paris un roc dans la tempête.
actu Paris : D’après un sondage Ifop-Fiducial publié vendredi 28 mars 2025 pour Le Figaro et Sud Radio, le bloc central – que ce soit Rachida Dati, Gabriel Attal ou Pierre-Yves Bournazel chef de file – arrive en tête (entre 31 % et 35 % selon le candidat). Derrière, la majorité sortante (entre 19 % et 20 %) et la liste écologiste de David Belliard (14 %) se battent pour la deuxième place. Dans un contexte aussi concurrentiel, comment imposer vos idées auprès des autres candidats ?
S.B : Ce qui m’intéresse, c’est de mettre mes idées sur la table et d’enclencher une dynamique des discussions avec les autres forces de gauche, à l’exception de La France insoumise (LFI). Mais, j’ai surtout une certitude, c’est que Paris ne se gagne pas seul. Donc, il faudra de toute façon une union. Mais une union qui aura lieu lorsque nous connaîtrons tous les candidats et leurs idées. C’est à ce moment que nous organiserons un débat sain avec nos partenaires. Aujourd’hui, Place Publique compte peser dans les discussions car nous incarnons une forme de renouvellement des idées et des personnes.
Mais pour l’heure, nous sommes dans le temps de l’affirmation des idées et pas encore dans l’incarnation. L’incarnation sans les idées, ça donne Rachida Dati. C’est le triomphe du vide, c’est la gesticulation permanente, c’est le buzz pour le buzz. Moi je pars de l’inverse, je considère que c’est la force des idées qui permet ensuite à l’incarnation d’être légitime. Pour nous, la première étape sera notre meeting, où je parlerai moins de moi que de mes idées. Je vais dévoiler quelques propositions lors de cette rencontre, même si ce ne sera pas l’entièreté du programme, et ensuite nous pourrons commencer la campagne sur le terrain.
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