Posée en l’an 2000 et prévue pour durer 10 ans, elle symbolise la station Lille-Europe depuis 25 ans. Photographiée dans les guides de voyage du monde entier, l’immense fresque du lillois Jean Pattou, décédé en 2023, est la première vision de Lille pour les visiteurs qui débarquent par le TGV. Et quelle vision ! Au printemps 2025, est en cours de rénovation. On revient sur son histoire.
Plus de 550 000 euros pour restaurer l’œuvre
Le temps, les intempéries et le soleil surtout ont fait disparaître peu à peu l’œuvre qui montrait des pans entiers complètement effacés. La MEL, propriétaire de la station de métro, a eu la bonne idée de restaurer l’œuvre qui sera de nouveau visible dans quelques semaines. Le montant de cette rénovation grandiose est de 558 000 euros.
Le sauvetage de ce chef-d’œuvre en voie de disparition mérite qu’on en raconte l’histoire et qu’on se replonge dans une idée alors unique de faire intervenir des artistes dans les stations du métro. Une idée inédite visant à humaniser un métro sans conducteur et sans présence humaine, en faisant intervenir un architecte et un artiste avec un budget minime. Une initiative plébiscitée par les premiers utilisateurs de la ligne 1 du VAL qui étaient plus impressionnés par les œuvres que par la prouesse technique de l’automatisme.
Une architecte et un artiste : Martine et Jean Pattou
C’est le cabinet d’architecture du couple lillois Pattou qui reçut en mission cette station de Lille Europe et qui s’employa à la rendre unique. D’abord, en l’ouvrant sur le quartier Saint-Maurice, alors que les plans initiaux de Rem Koolhaas, l’architecte hollandais de l’ensemble d’Euralille, voulaient en faire le point final d’un quartier tout entier tourné vers la ville de Lille et flanqué d’un parking qui entrait dans la station.
Dans la grande tradition de l’époque, le béton devait rester visible, créant un univers cru et glaçant, renforçant l’idée du chaos voulue par l’architecte.
Les pays et leurs monuments sur 2 500 m2
Jean Pattou, qui a tant dessiné et peint et montré partout dans le monde ses croquis de Lille, s’employa à peindre l’œuvre monumentale couvrant près de 2 500 m2. Elle montre qu’à partir de Lille Europe, au cœur de la métropole du fait du métro, on est au centre du monde. À 45 minutes de Roissy qui donne l’accès à toute la planète.
De ce fait, le mur Est de la station figure les pays et les lieux mythiques de ces pays, le mur Ouest ceux des Amériques, le mur Nord de tous les pays nordiques. Tous les pays visités par l’artiste, au fil des vernissages et des expositions et de ses visites professionnelles, sont représentés par leurs monuments. Une manière de réinvestir les carnets de voyage.
On y redécouvre les monuments les plus célèbres, de ces continents. Les personnages de Lille y défilent. Célébrités comme Jean-Claude Casadesus, la fanfare de l’école des Beaux-arts… et Rem Koolhaas, chassé par l’artiste après qu’il ait tenté auprès de Pierre Mauroy de le lui faire retirer sa mission…
15 mètres de hauteur
Une véritable performance pour un artiste qui peignait très vite (mais l’ouvrage lui a pris tout de même un an) et qui avait un sens inouï de la perspective qui fait que, quel que soit l’endroit d’où on regarde cette fresque de 15 mètres de hauteur, on a l’impression d’être de plain-pied avec elle.
Si les dessins originaux sont peints sur des tableaux d’un mètre carré environ, ils ont été numérisés sur une toile posée sur une ossature d’acier. Une innovation technique à l’époque qui a nécessité un montage très sportif.
La livraison prochaine au public de cette œuvre, restaurée, témoigne, ainsi que la MEL l’écrit, d’un engagement renouvelé « de faire de chaque station un espace culturel privilégié ».
Jean-Michel Stievenard
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